La culture du tabac sur Venerque

1er PARTIE

Introduction DU TABAC EN FRANCE

Le tabac a débarqué sur le « Vieux Continent » à la suite de la découverte des Amériques à la fin du XVe siècle. Tout comme la tomate ou encore le haricot, le tabac traverse l’Atlantique et trouve de nouvelles racines sur le sol européen. Naturellement les premiers signalements de cette nouvelle herbe se trouvent dans les Royaumes prenant part aux expéditions, tel que le Portugal.

Le destin de la plante est bouleversé au XVIe siècle lorsque Jean Nicot envoie du tabac à la reine Catherine de Médicis pour soigner ses maux de tête. En effet, le tabac a d’abord été popularisé pour ses propriétés médicinales ! Originaire de Nîmes, Jean Nicot avait été nommé en 1559 à Lisbonne, comme ambassadeur, par le roi de France, François II.

Sa proximité avec la Couronne lui a permis de rencontrer les plus grands esprits de la Cour. Un certain Damião de Góis lui présente une plante encore tout à fait inconnue à ses yeux : le tabac Jean Nicot est témoin de la guérison d’un ulcère sur le visage (d’un proche d’un de ses pages) par l’application durant plusieurs jours de tabac. Les propriétés médicinales de cette plante attisent la curiosité du Nîmois. Dans ce contexte et en tant que bon ambassadeur et courtisan Jean Nicot s’empresse d’envoyer du tabac en France pour faire connaitre sa découverte. Il avait connaissance des maux de tête de la Reine Catherine de Médicis ainsi que certaines personnes de son entourage. Le natif de Nîmes prend le soin d’envoyer avec le tabac des instructions pour la culture et la préparation des feuilles.

En 1560, la Reine-mère reçoit le tabac envoyé par son ambassadeur. Catherine de Médicis souffrait de migraines chroniques et l’utilisation du tabac sous forme de prise lui soulagea considérablement ses maux de têtes. Le tabac trouve rapidement une place de choix au sein de la Cour du Royaume de France et se diffuse progressivement dans les couches aisées de la population.

André THEVET -  1516 - 1592

 

Jean Nicot ou André Thevet ?

L’ambassadeur Jean Nicot a popularisé la plante dans le Royaume de France. Son importance au sein de la diplomatie française lui a donné une vitrine exceptionnelle pour rapporter ses découvertes. Cependant si on se penche plus en détail sur l’Histoire du tabac en France, on voit apparaitre un personnage se défendant, lui-aussi, d’être le tout premier importateur de la plante : André Thevet.

Cela serait grâce à ce moine de l’ordre des Cordeliers d’Angoulême que l’on doit la présence du tabac dans le Royaume. Après un voyage au Levant de 1549 à 1552, il part en Amérique du Sud comme aumônier de l'expédition dans le but de fonder un établissement français dans la baie de Rio. Il débarque donc au Brésil en 1555 et y découvre notamment cette fameuse plante. Au cours de cette expédition, l’Angoumois s’attache à observer la faune et la flore mais aussi le mode de vie des Indiens. Malade, il ne reste que quelques mois au Brésil. Il revient en 1556 dans le couvent des Cordeliers et y sème les précieuses graines rapportées du Brésil.

Cependant à son retour dans son couvent en 1556, il utilise le tabac simplement dans un but ornemental, afin de garnir les jardins de son couvent. Il nomme cette plante « herbe angoumoisine » du nom de sa ville d’origine. La plante est donc présente dans le Royaume en 1556, soit quatre années avant l’envoi de tabac par Jean Nicot à Catherine de Médicis. On constate donc qu’André Thevet devance bel et bien Nicot dans l’importation du tabac en France. Néanmoins, l’ambassadeur récolte toute la renommée et le prestige de cette découverte de par son statut. Il s’en suit tout au long du XVIe siècle une querelle entre ces deux protagonistes.

Le succès quasi-immédiat du tabac dans l’entourage de la Reine-mère profita amplement à Jean Nicot. En effet, cette plante se voit même attribué un surnom en hommage à Nicot en guise de remerciement. Elle est dorénavant appelée Nicotiane « afin que luy rendions tel honneur qu’il a mérité de nous, d’avoir enrichi nostre pays d’une herbe tant singulière ». Cependant la renommée attribuée à Jean Nicot déplaît fortement à André Thevet. Cette frustration et ce manque de reconnaissance est perceptible dans son œuvre écrite en 1575 intitulée « Cosmographie universelle d’André Thevet, cosmographe du roy ». Dans cette dernière, Thevet revendique sa primauté concernant l’utilisation cette plante au sein des frontières du Royaume de France, comme le montre ce passage : « Je puis me vanter d’avoir été le premier en France qui a apporté la graine de cette plante et pareillement semée, et nommé ladite plante l’herbe angoumoisine ».

De plus, la cosmographe en profite pour critiquer le désormais célèbre Nicot : « Depuis un quidam, qui ne fit jamais le voyage, quelque dix ans après que je fus de retour de ce pays, lui donna son nom ». André Thevet se targue ici d’avoir lui-même ramené une plante provenant de son environnement d’origine contrastant ainsi avec Jean Nicot qui eut simplement à envoyer du tabac depuis le Portugal. Il n’a pas voyagé comme Thevet dans les contrées de l’Ancien Monde à la recherche de plantes et produits inconnus jusque-là en Europe. Malheureusement pour le moine-cordelier, c’est la renommée et l’influence du personnage de Nicot qui a marqué l’Histoire au détriment des faits réels. Malgré son combat, le terme de nicotiane reste dans la postérité mettant ainsi en avant Jean Nicot, à tort.

 Le tabac venant d’Amérique était soumis à des droits de douanes et c’est Colbert en 1674 qui créa une « Ferme Royale » pour sa culture.
La révolution Française mis fin aux fermes royales établissant ainsi la liberté de production et de commerce. Mais dès 1810, Napoléon établissait un « monopole d’état » pour la culture, fabrication et vente, ce dernier étant confié au Ministère des Finances, qui fonctionna jusqu’en 1959. Le résultat de l’exploitation était alors affecté à l’amortissement de la dette publique.

En 1924

Création du service « Service d’Exploitation Industrielle des Tabacs » S.E.I.T qui deviendra plus tard S.E.I.T.A le A pour allumettes.
En 1935

Le service absorbe le monopole des allumettes, affermé alors à une régie d'État nommée Compagnie générale des allumettes chimiques, et devient ainsi le SEITA. Celui-ci contrôle alors 22 manufactures des tabacs réparties sur l'ensemble du territoire national et vend uniquement les marques Gauloises et Gitanes.

En 1970

La culture du est rattachée au Ministère de l’Agriculture.
En 1980

Celui-ci se transforme en société d'économie mixte ; la SEITA est privatisée en 1995 et fusionne en 1999 avec la société espagnole Tabacalera pour donner naissance à Altadis, elle-même rachetée en 2008 par Imperial Tobacco.

texte et images

Histoire du tabac à TONNEINS

 



2éme PARTIE

La culture du tabac a Venerque

Le terroir de notre commune a connu pendant des années la culture du tabac.

Cette herbacée apprécie la chaleur et l’humidité. Les familles JOSEPH et PLANTADE lui offrirent la rive droite de la HYSE pour la faire pousser. Le tabac se multiplie par semis. En raison de la petitesse des graines (environ 11 000 graines au gramme), il est impossible de faire du semis direct.

Au mois de février, le planteur préparait ses plans sur une bande de terre préalablement désinfectée à la vapeur, qu'il protégeait du froid en la couvrant d’une bâche en plastique. Les graines étaient mélangées à de l'eau et versées sur le sol à l'aide d'un arrosoir muni d'une petite rampe d'arrosage pour être ainsi réparties au mieux. Ces graines étaient fournies par le Service d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (La SEITA). 


 

 

Deux à trois mois plus tard les plans pouvaient être plantés sur une terre soigneusement préparée par un profond labour,et un apport de nutriments adaptés.

Le tabac allait pousser sous l'attention permanente du cultivateur, qui empêchait le développement de mauvaises herbes et en prévenait l’apparition de maladies telles que le mildiou ou le thielavia.

pince à épamprer.

Au mois de juillet

les feuilles bases de moindre intérêt étaient coupées à l'aide de la pince à épamprer. Il s'agissait d'un outil constitué d'un manche à l’extrémité duquel se trouvaient deux pinces formant un anneau. A l'aide d'une poignée de type frein de bicyclette les deux pinces s'ouvraient pour permettre le passage de la tige de la plante, au-dessus des feuilles à éliminer. Lorsque l'on relâchait la poignée les pinces se refermaient. Un mouvement de l'outil vers le bas provoquait l'arrachage des feuilles impropres.

Au mois d'août

La fleur,qui se développait à l’extrémité du plan,au détriment des feuilles,était éliminée. Pour cela le planteur utilisait la pince à écimer. Il s'agit en fait d'un sécateur couplé à un bidon contenant une huile spéciale dite « bourghol » ou « stop bourgeons ». Lorsque la pince coupait la tige de la fleur, une petite quantité d'huile était libérée. Celle-ci s'écoulait le long de la tige pour se concentrer à la base du pétiole au point d'insertion. Les propriétés biologiques du liquide empêchaient le développement du bourgeon potentiel.

pince à écimer

couplé à un bidon contenant une huile spéciale dite « bourghol »

La récolte pouvait débuter

2 à 3 mois après le repiquage, c'est à dire au mois d’Août. Les signes de maturité apparaissaient d’abord sur les feuilles de base qui devenaient vert clair. La récolte se faisait en feuilles. Il s'agissait de cueillir 3 ou 4 feuilles sur chaque plant, une fois par semaine, en commençant par les feuilles les plus basses car elles mûrissent les premières, ensuite celles du milieu, avant de terminer par celles en haut de la tige. On distinguait ainsi les feuilles en trois catégories : les basses, les médianes et les hautes. La récolte durait un mois. Les feuilles ramassées étaient rapidement dirigées vers la ferme pour éviter qu’elles ne soient brûlées par le soleil. Elles étaient ensuite enfilées avec une ficelle de sisal pour constituer une guirlande, au poste d'enfilage. Les guirlandes était pendues dans le séchoir

plant de tabac prêt a ramasser

Machine a enfilée les feuilles de tabac

A gauche

guirlande de feuilles

A droite

séchoir 

 

C’était un long travail qu’il fallait faire régulièrement. Cette activité offrait un emploi d'été à de nombreux jeunes gens du village et des alentours, juste avant la rentrée scolaire. Au cours de l'hiver lorsque le tabac avait séché doucement au courant d'air, il était dépendu. Les feuilles étaient rassemblées entre-elles en veillant à respecter les différentes catégories, pour constituer « une manoque » de 24 feuilles, la vingt-cinquième servait à lier l'ensemble. Les manoques étaient ensuite conditionnées en petites balles parallélépipédiques qui seront vendues à la SEITA sous la halle du village, où se retrouvaient tous les planteurs de la région.

Les points de vente de la région étaient divisés en deux zones

1) St GAUDENS / CAZERES / BOULOGNE SUR GESSE

2) GRENADE SUR GARONNE / VILLEMUR SUR TARN / CARAMAN / VENERQUE 

REMERCIEMENT 

A

SERGE ET MICHEL

pour le texte et les photographies

juin 2023